Chantiers navals de Rome, 1957
Ingénieur en chef :
et voici le titan des mers, la merveille des merveilles, le paquebot
« Europe ». Il est véritablement insubmersibles grâce à
ses compartiments étanches répartis
le long de la partie interne de la coque. A ce propos, savez-vous que
chacun de ces compartiments porte le nom d’un pays qui a participe
à
la construction de ce bateau ?
Jean Monnet :
très intéressant, et vous me dites que ce navire va nous permettre
de résister à
tous nos concurrents ?
Ingénieur en chef : parfaitement, il ne
craint personne grâce à
son système de propulsion ultra-moderne qui lui permet de voyager à
des vitesses de plus de vingt nœuds durant des jours entiers.
De plus ses chaudières consomment peu pour un rendement maximal,
c’est véritablement le mariage réussi du charbon et de l’acier !
Jean Monnet : très bien, et quand
sera-t-il prêt ?
Ingénieur en chef :
il faudra attendre une petite cinquantaine d’années, le temps
d’élargir le bateau. Nous comptons en effet lui adjoindre
davantage de compartiments étanches pour le rendre encore plus sûr.
Jean Monnet : faites donc mon cher,
faites donc…
Port de Lisbonne, 2007
Journaliste :
… et le paquebot « Europe » va donc larguer ses amarres
pour entreprendre son voyage inaugural à
l’assaut des flots de l’Atlantique ! C’est le résultat
d’années de labeur acharné mais qui ont fini par payer. Ce ne fut
pas sans mal toutefois, et nous avons encore tous en tête la révolte
des ouvriers des chantiers navals de France et des Pays-bas, il y a
deux ans, alors qu'ils avaient refusé de reprendre le travail sans
avoir de meilleures garanties quant à
la robustesse et la fiabilité du navire une fois les travaux
achevés. Il a fallu toute la poigne des managers pour passer outre
ces craintes ridicules, et forcer la main à
ces mauvais employés qui ont failli faire capoter ce magnifique
projet !
Et encore je suis sympa, je vous épargne Céline Dion!
Quelques jours plus tard, dans l’Atlantique nord...
Barroso :
tout va bien à
bord, second nº8 ?
Second :
tout va bien commandant nº2,
mais il y a quelque chose que je ne comprends pas. Nous avons trois
commandants, dix-sept seconds, vingt-quatre responsables en chef
« salle des machines », sept cent quartiers-maîtres…
et mille sept cent vingt traducteurs ! Bref nous avons bien trop
de membres d’équipage par rapport à
nos besoins réels…. C’est quoi ce bordel ?
Barroso :
oh ce n’est rien, chaque pays a fait travailler ses propres
architectes sur le bateau, parfois sur les mêmes composants. Du coup
on se retrouve entre autres avec cinq timoneries et quatre salles des
machines, alors il a bien fallu remplir tout cela...
Second : oui mais on a plus de membres
d’équipage que de passagers… je me demande si ça fait très
sérieux.
Officier radio
(entrant dans la cabine du… enfin des
commandants) : commandant nº2,
je viens de recevoir un message du brise-glace néerlandais « Gert
Wilders », son capitaine nous signale un important champ
d’islamistes dérivant au large des bancs de Terre Neuve, il
conseille à
tous les navires d’éviter la zone !
Barroso : merci officier radio nº87,
mais ce navire est insubmersible, que risquons-nous ?
Second :
tout de même commandant nº2
je me demande, je sais bien que ce paquebot est réputé pour sa
solidité, mais un champ d’islamistes peut faire de sacrés dégâts.
Regardez par exemple ce qui est survenu dans les eaux entourant le
Moyen-Orient, les navires « Iran », « Arabie
Saoudite », « Qatar »… tous coulés !
Barroso :
oui je sais, second nº8,
mais ces navires étaient mal conçus, avec des matériaux
vieillissants. Nous ne risquons rien, nous ! (à
l’officier radio) quant à
vous, envoyez un accusé de réception au brise-glace en lui
précisant qu’il tient des propos nauséabonds !
Au même moment sur la proue du paquebot, un
gnome au physique ingrat est en train de gesticuler, les bras en
croix.
Sarkozy : j’ai été élu président !
ch'suis l'roi du monde !!!
Une voix derrière lui :
Nikolas ! Arrête un peu afek tes konneries, petit polißon !
tu fas finir par tomper à
la mer !!! Ça t’a pas suffi le yacht de ton kopain Polloré ?
Sarkozy (résigné) : oui bon,
j’arrive Angela, j’arrive…
Un peu plus tard encore...
Officier radio :
commandant nº2,
je viens de recevoir un message du brise-glaces suisse « Oskar
Freysinger », il confirme les observations du brise-glaces
« Gert Wilders » et précise même que ce champ
d’islamistes est de plus en plus dense et s’étend maintenant à
perte de vue devant nous ! Il
n’a jamais vu cela !
Second : commandant nº2,
dans ces conditions je crois qu’il serait plus prudent de ralentir
et d’infléchir notre route vers le sud…
Barroso :
suffit second nº8,
c’est moi qui donne démocratiquement les ordres ici, enfin avec
les commandants nº1
et 3, donc je décide que l’on ne
change rien à
notre cap et notre allure ! Et ce n’est pas quelques
islamistes qui vont nous faire peur ! Et vous officier radio
nº87…
Officier radio : euh non… moi je suis
le nº72,
commandant nº2...
Barroso : oui bon… envoyez un message à
l’« Oskar Freysinger » pour lui dire que ses rapports
sont dignes des heures les plus sombres de notre histoire…
Second : mais commandant nº2,
depuis plusieurs jours je discute avec les passagers, vous savez ceux
de troisième classe, et bien ils semblent inquiets à
l’idée que l’on puisse se retrouver dans un tel champ. Déjà
plusieurs m’ont demandé s’il ne fallait pas modifier notre
route, quitte à arriver
plus tard à destination,
histoire d’éviter les écueils…
Barroso
(éclatant de rire) :
ah ! S’il fallait tenir compte de l’avis des passagers
maintenant… !
Au même moment dans une cabine de première
classe…
Merkel : QUOI !!?? Que che me foute
à poil pour ke tu me
deßines ? Mais ça fa pas pien Nikolas ou koi !!??
Cette nuit là,
au sommet du mât
d'observation du navire…
Vigie nº711 :
bon dieu ! Un islamiste, là
droit devant ! Vite, sonne l’alarme !
Vigie nº340 :
Euh… ¿Qué ?
Vigie nº711 :
ah merde, il est espagnol, et je ne parle pas sa langue… ils sont
où
les traducteurs quand on en a besoin ???
Vigie nº340 :
Euh… ¿Comó ?
Vigie nº711 :
ben euh… toi envoyer signal à
timoniers à
cause danger droit devant !
Vigie nº340 :
¿ ?
Vigie nº711 (avec
un dictionnaire français-espagnol)
: euh…!Tu llamar a los euh… timonieros porque euh… gran peligro
euh… adelante ¡
Vigie nº340 :
¿Que ? ¡No
te entiendo a causa de tu acento !Vigie nº711 (avec une feuille de papier et un stylo) : bon là je te dessine... là c’est toi, tu vois, puis le gros truc très moche avec la barbe c’est un islamiste, d’accord ? Et là ce que je dessine c’est la passerelle de commandement du bateau, alors tu vois « toi » aller à « passerelle » parce que « islamiste », c’est bon ?
Vigie nº340: ¡Que dibujo de mierda ! ¿Que significa ? ¡No entiendo !
Vigie nº711 : MAIS BORDEL C'EST PAS COMPLIQUÉ !!! VAS A APPELAR LOS OTROS IMBECILOS DERRIÈRE PORQUE HAY …
BRUIT DE COLLISION
Vigie nº711
: euh… non rien, laisse tomber finalement…
Vigie nº340 :
¿Comó ?
Dans la cabine du… enfin des commandants...
Second : commandant nº2,
nous sommes dans un champ d’islamistes ! Ils nous encerclent
et l’un d’eux nous a même éperonnés, il faut sonner l’alarme
vite !
Barroso :
du calme second nº8,
il ne faut pas céder à
la panique ! Faites venir l’ingénieur de bord pour qu’il me
donne un rapport des avaries. Nous aviserons ensuite, et faites
arrêter les machines !
Second : euh… quel ingénieur en chef
commandant nº2 ?
Il y en a treize !
Barroso : n’importe ! Celui que
vous trouverez !
Plus tard...
Second (de retour dans la cabine) : ça
y est commandant nº2,
les machines sont arrêtées et l’ingénieur en chef nº4
arrive !
Barroso : bien mais… comment se fait-il
que nous bougions toujours ?
Second : et bien en fait les commandants
nº1
et 3 ont donné
l’ordre de garder l'allure en avant lente, du coup il a fallu
choisir alors j’ai arrêté la salle des machines nº1
mais pas les autres…
Barroso : mais alors si certaines hélices
sont immobilisées et d’autres non, cela veut dire que nous
tournons en rond !
Second : euh… affirmatif commandant
nº2 !
Barroso :
remarquez, c’est un peu exactement ce qu’on fait depuis le début
de cette croisière… bon ce n’est peut-être pas plus mal après
tout, les passagers ne remarqueront rien au moins…
Ingénieur en chef (faisant son
entrée) : commandant nº2,
j’ai de mauvaises nouvelles, les compartiments étanches
« France », « Allemagne », « Belgique »,
« Pays-Bas », « Royaume-Uni » et « Espagne »
sont déjà complètement inondés à
cause de la brèche provoquée par le champ d’islamistes, il s’en
infiltre partout…
Barroso :
six compartiments sont inondés ? Mais alors cela veut dire que
le navire est fichu…
Ingénieur en chef :
précisément commandant nº2,
il va nous falloir abandonner le bâtiment à
ce champ d'islamistes si nous voulons sauver notre peau !
Dans le hall principal c’est la panique,
et le paquebot prenant de plus en plus de gîte, les passagers
courent affolés dans tous les sens...
Architecte naval (dans un coin du hall) :
mon dieu, c’est horrible, cette merveille qui prend l’eau de
toutes parts… cinquante ans de construction de l’Europe foutues
en l’air !
Un homme (passant près de lui) : mais
non voyons, il ne faut pas être aussi pessimiste !
Architecte :
pardon ??
L’homme :
oui, il ne faut pas être sectaire et considérer que tout doit être
sec ! C’est une uniformisation nauséabonde ! Il y a
également de la place pour l’eau dans ce bateau, et il ne faut pas
chercher à
colmater les fuites. Moi je dis que nous avons besoin de l’eau et
que l’eau est une chance pour nous. Sans eau il n’y a pas de vie,
c’est pourquoi l’eau devrait être libre de s’installer ici si
ça lui chante, et non il ne faut pas mettre de gilet de sauvetage
car c’est une attitude de protection offensante, de fermeture à
l’encontre de l’eau ! Réjouissons-nous
plutôt de toute cette eau qui vient à
nous !
Architecte (interloqué) : vous… vous
ne seriez pas socialiste par hasard ?
Homme :
oui enfin non, je veux dire… je milite au « Front de
Gauche », pourquoi ?
Plus loin dans une coursive à
moitié inondée...
Sarkozy :
ch'sais pas pourquoi, mais tout ça m'rappelle un peu la Grèce
Merkel (gogunarde) :
moi che troufe plutôt que ça fait penser à
la France…
Sarkozy :
ouais ben aide-moi plutôt à
atteindre une chaloupe au lieu d'te fout'de moi !
Au dehors c’est l’apocalypse :
quelques esquifs errent désemparés au milieu des débris et de
l’immense paquebot qui s’enfonce irrémédiablement dans les
flots, alors que des centaines d’hommes et de femmes surnagent dans
l’eau glacée.
Dans l’un des radeaux de sauvetage...
Barroso (regardant le navire sombrer) :
c’est dommage l’Europe, c’était pourtant une belle
idée…
Technocrate :
on pourrait peut-être profiter de la situation pour évoquer les
quotas de pêche, non ?
Vigie nº711 : moi je dis, si la commission nous avait fourni davantage de traducteurs, ce drame aurait pu être évité!
Vigie nº340 : ¿Comó ?
Second :
commandant nº2,
il y a un diplomate turc à
côté
de moi là,
il voudrait savoir si ce petit incident va remettre en cause les
pourparlers pour permettre aux marins de son pays de faire également
partie de l’équipage du euh... navire…
Architecte naval : ça dépend, il y a
des sous-mariniers dans son pays ?
Tout-à-coup
une autre chaloupe passe en trombe près du petit groupe. Dans
celle-ci on peut y voir le militant du « Front de Gauche »
ramant désespérément avec trois gilets de sauvetage autour de la
taille. Il n’y a que lui, sa femme et ses enfants dans
l’embarcation prévue pourtant pour une vingtaine de passagers. Il
croise alors le regard interloqué de l’architecte...
Militant du
« Front de Gauche » (visiblement agacé) :
QUOI ???
Dans un autre radeau, un peu plus loin…
Merkel : et on fa enkore tire que c’est
la faute des allemands tout ça… pourtant c’était pas un U-boot
cette fois...
Sarkozy :
enfin, ça aurait pu êtr'pire, ma Rolex est étanche…
Merkel : tis Nikolas, et les troissièmes
classes là, le peuple,
k’est-ce k’on en fait, on fa les saufer ?
Sarkozy (ramant pour s’éloigner des
naufragés) : qu’y s'débrouillent !
Comme si on était a leur service à
ceux-là !
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