mercredi 3 avril 2013

Histoire de cabinet


- Monseigneur Sécrable ?

L’homme dont le veston noir étrennait une discrète croix argentée fit son entrée dans la salle de consultation à l’appel du médecin. Ce dernier prit place derrière son bureau, un imposant meuble en chêne massif, et invita son patient à s’asseoir en face de lui.

- Alors, monseigneur, que puis-je pour vous ?
- Et bien docteur, je n’irai pas par quatre chemins… je viens vous voir parce que je suis atteint d’un trouble particulièrement insidieux. En clair je pense être allergique au socialisme !
- Ah, très bien, répondit l’allergologue, pourriez-vous m’en dire davantage ?
- Voilà, docteur, depuis plusieurs mois, je l’ai constaté, je suis de moins en moins tolérant envers la bêtise affligeante, l’hypocrisie haineuse, le sentiment de supériorité morale hautain et injustifié, le clientélisme sans gêne et surtout l’incompétence totale et l’amateurisme dont font preuve le gouvernement et le chef de l’Etat… cela m’horripile de plus en plus, me plonge dans des abîmes de consternation et de désarroi, et j’en viens même parfois à me montrer particulièrement rustre envers mon entourage, sans raison, du fait de mon état d’énervement…
- Je vois… en fait ce que vous me dites ne me surprend guère, monseigneur, attendu que nous assistons à une généralisation absolument alarmante de ces symptômes au sein de la population française. Certains de mes collègues n’hésitent même pas à parler de pandémie…
- Alors docteur, je suis bien atteint d’allergie au socialisme ?
- Sans doute, monseigneur, mais je dois procéder à un petit test pour m’en assurer…
- Faites donc, docteur, je vous en prie…
- Veuillez m’attendre ici, monseigneur, je ne serai pas long…

Le médecin se leva alors et disparut derrière une porte qui semblait mener à une sorte de débarras au fin fond de son cabinet. Il réapparut bientôt, tenant par la main un jeune homme au regard vide et à la silhouette quelque peu avachie qu’il assit sur une chaise près de lui.

- Je vous présente Laurent, fit le docteur en reprenant sa place derrière le bureau. Je vous demanderai, monseigneur, d’être particulièrement gentil et patient avec Laurent car celui-ci est… disons… c’est assez délicat… en fait Laurent est… membre du Mouvement des Jeunes Socialistes…
- Oui, je l’avais deviné à son regard quelque peu ahuri… mais il a l’air mal en point, votre Laurent, docteur. Voyez son poil terne, et comme j’évoquais son regard, voyez donc ses yeux vitreux, secs, et la bave qui coule ainsi de ses lèvres… le pauvre garçon semble avoir des problèmes !
- Il faut que je vous dise, monseigneur, Laurent est en fait… le président des Jeunes Socialistes…
- Ah oui, je vois, je suis désolé…
- Bon, assez de palabres, je vais procéder à une expérience simple, monseigneur. Je vais demander à Laurent de nous dire tout ce qui lui passe par la tête et je vais étudier vos réactions. Etes-vous prêt ?
- O… oui, fit le religieux, l’air peu rassuré en fixant le nouvel arrivant.
- Très bien… bon, Laurent, nous t’écoutons, reprit le médecin en tapant d’un coup sec dans ses mains.

Le malheureux jeune homme sortit subitement de sa torpeur, se redressa, et prononça ces quelques mots :

- Francois Hollande est le président qu’il nous faut !
- Humf… fit l’homme d’église en esquissant une grimace de douleur.
- Courage, monseigneur, répondit le médecin qui l’observait attentivement, je compatis sincèrement, croyez le bien, mais il vous faut aller jusqu’au bout…
- Deux « papas » ou deux « mamans » c’est la même chose qu’un « papa » et une « maman » ! reprit Laurent, et tout est égal, tout se vaut !
- Argh…
- Les étrangers paient des impôts en France, donc ils devraient avoir le droit de voter, c’est logique, non ?
- Gniiiiiiiiiiiiii !!!
- Il n’est pas normal que certains gagnent beaucoup d’argent !
- Docteur, ça… ça commence à me gratter partout !
- Il nous faut un Etat encore plus fort, avec plus de fonctionnaires et de services publics, et il nous faut dépenser encore davantage pour plus d’efficacité !
- Ouch ! Ça me démange !
- L’immigration est une chance pour la France car nous sommes tous citoyens du monde, et il faut assouplir les procédures de régularisation des sans-papiers !
- Je… ça devient difficile, là, docteur !
- Il faut soutenir les associations courageuses comme SOS Racisme et leur donner encore plus de subventions publiques !
- Docteur je… regardez ! Ma peau se couvre de boutons ! Et là je… j’ai des pustules ! Mais… mais ce sont carrément des bubons !!!
- Il faut imposer encore davantage les riches, les entreprises, et tous ceux qui créent de la richesse en général pour redistribuer cet argent à ceux qui ne vivent que d’aides sociales, quelles que soient les raisons pour lesquelles ils ont moins ! C’est cela la solidarité !
- Docteur… ça fait mal !
- Les emplois aidés sont un outil efficace contre le chômage!
- Docteur... PAR PITIÉÉÉÉÉÉÉÉÉÉÉÉÉÉÉÉÉÉÉ !!!! hurla l’évêque au bord de la crise d’apoplexie.
- Il faut mettre encore plus d’argent dans l’Education Nationale, embaucher encore plus de professeurs qui distilleront la propagande de la gauche, et favoriser les programmes scolaires qui font la part belle à la théorie du genre et aux cultures d’ailleurs au détriment de l’histoire de France ! Il faut culpabiliser les gens dès le berceau pour qu’ils aient honte d’être français et qu’ils sachent bien qu’il n’y a pas d’avenir sans métissage et que leurs véritables racines sont ailleurs, et nous avons forcément raison parce que nous sommes le parti du Bien et…
- TA MÈRE SUCE DES BITES EN ENFER!!! vociféra le religieux d'une voix pas très catholique et en vomissant un liquide nauséabond, voire rappelant les heures les plus sombres de l'Histoire, sur le parquet ciré, ce qui faisait, il faut l'avouer, plutôt mauvais effet...
- Bon, ça va Laurent, tu peux arrêter maintenant, ça suffit !

Le jeune homme obéit immédiatement à l’injonction du médecin et reprit son mutisme initial, ainsi que son air quelque peu demeuré…

- Docteur je… c’est épouvantable ! Comment pouvez-vous résister à une telle débauche de crétinerie aussi concentrée ? Ça ne vous fait rien à vous ? demanda le malade en reprenant tant bien que mal ses esprits.

L’allergologue mit les mains à ses oreilles et en retira deux boules Quies.

- Pardon, vous me disiez quelque chose ?
- Je… non, je vois que vous prenez vos précautions !
- Oui, cela m’aide à résister à la tentation de l’occire, voyez-vous… Laurent est un être particulièrement horripilant ! Je l’ai entendu une fois et ça m’a suffi. J’imagine qu’il vous a sorti la même chose qu’à moi ! Bon en même temps il n’est pas président des jeunes socialistes par hasard… je crois que chez eux c’est le plus atteint qu’ils choisissent pour les représenter.
- Mais… où avez-vous trouvé un tel énergumène ?
- Rue de Solférino, tout simplement… au siège du PS… ils sont en train de se débarrasser de leurs vieilleries et de tout ce qui peut les encombrer. Ils vident les greniers en quelque sorte. Je suis tombé ainsi sur un très beau lot Strauss-Kahn-Royal-Cahuzac qu’ils offraient gratuitement. J’étais tenté, mais je me suis dit que cela ferait un peu trop pour mon cabinet, d’autant plus qu’il faut les entretenir et qu’ils ont des goûts de luxe, comme tout socialiste qui se respecte… cependant ça peut faire joli au milieu des plantes vertes… à condition d’apprécier l’art moderne bien évidemment. Ça remplace aussi avantageusement les nains de jardin !
- Je vois docteur, mais pour en revenir à ce Laurent, si jeune et déjà si… atteint, si… inadapté au monde réel… docteur c’est terrible, mais je crois que sa vie est d’ores et déjà fichue !
- Sans doute monseigneur, des êtres comme Laurent existent bel et bien, comme vous pouvez le voir, et ils sont une lourde charge pour la société du fait de leur inutilité totale, mais nous ne pouvons pas les abandonner ainsi, nous sommes quand même civilisés… quelques voix charitables ont d’ailleurs proposé l’organisation d’une sorte de Téléthon pour aider à financer la recherche contre cette plaie qu’est le socialisme, surtout quand il s’attaque ainsi à la jeunesse, mais sincèrement, et c’est le spécialiste qui vous parle, je doute qu’un remède vraiment efficace puisse un jour être mis au point !
- Seigneur ce… en vérité cela fait peur, docteur !

Le médecin prit une profonde inspiration, rajusta ses lunettes et joignit les mains devant la bouche avant de fixer son interlocuteur dans les yeux :

- Bien, monseigneur, je dirais que notre petit test est concluant ! Vous avez raison. Vous êtes bel et bien allergique au socialisme, ou tout du moins aux socialistes, comme de plus en plus de Français, ma foi…
- Ah !
- Ceci dit, et c’est là le problème, il existe bien des médicaments pour vous aider à résister à pareil fléau, mais entre nous je les déconseille fortement…
- Comment cela ?
- Et bien, prenez le Mélenchon 500 super effervescent par exemple… il fut un temps prescrit car il semblait aider l’organisme à s’habituer au socialisme sans trop forcer, mais nous nous sommes depuis aperçus que ce produit était en réalité pire que le mal… je dois vous dire… le Mélenchon 500 provoque à terme une telle réaction de rejet de la part de l’organisme que les effets sont souvent dévastateurs. En clair il s’agit d’une drogue fortement toxique, c’est pourquoi je refuse de la prescrire !
- Ah… mais il n’existe pas d’alternative ?
- Si… le Sarkozène, vendu par les laboratoires UMP. Mais bon, autant vous le dire tout de suite, ce produit vous procure une nausée certaine, sans compter qu’il est loin de pouvoir vous prémunir contre le socialisme. En réalité il agit un peu comme un vaccin, c’est-à-dire qu’il contient lui-même des éléments actifs, mais affaiblis, de socialisme, l’idée étant d’aider l’organisme à s’y habituer. Mais hélas il se révèle fort inefficace, voire même dangereux, et certains effets secondaires comme le nanisme ne sont pas à exclure. De plus, et sans que l’on sache trop pourquoi, le Sarkozène semble donner à ceux qui en prennent la maladie de Gilles de la Tourette, ce qui, vous l’avouerez, est plutôt ennuyeux…
- Ah oui, en effet, curieux…
- Bref, je déconseille fortement ce produit, comme tout ce que peut produire les laboratoires UMP d’ailleurs, méfiez-vous !
- Très bien… et sinon, rien d’autre, docteur ?
- Oh, si, il y a bien le Marine Plus, mais bon, entre nous ce n’est pas terrible. Il agit un peu comme le Mélenchon 500 ; il paraît efficace au départ, mais lui aussi, au final condamne l’organisme à être totalement dépendant au socialisme, d’autant plus qu’il en contient à forte dose, lui aussi. Non, honnêtement, allez voir ailleurs. Il existe aussi la Bayrouine, mais bon, rien de bien sérieux ; c’est un placebo, donc sans aucun effet bénéfique. J’ai également entendu parler de quelques produits plus ou moins douteux, comme le Besancenotilène, hautement toxique (on en servait à petites doses dans les maisons de retraite pour stimuler les petits vieux, mais ça les faisait délirer et ça leur grillait ce qui leur restait de neurones), le Cohn-Bendit 68, un produit fortement douteux coupé au pneu de vélo, la Joly-Benbassa-Duflotéine, mais ça rend particulièrement idiot, même si son principal avantage, le seul d’ailleurs, est d’être biodégradable. En outre ce dernier médicament a comme particularité de provoquer chez celui qui en consomme une véritable haine de lui-même, et le malheureux ne peut s’empêcher de se frapper du fait de cette culpabilité injustifiée. Je vous laisse imaginer les dégâts sur le mental. Certains finissent totalement schizophrènes...
- Je vois… ainsi docteur, il n’existe aucun remède réellement efficace et inoffensif pour l’organisme ?

Le médecin soupira…

- Hélas, monseigneur, aucun ne combat véritablement le socialisme… du moins en France. Autant vous le dire tout net, notre pays est complètement démuni. En réalité, monseigneur, je connais beaucoup de Français fortement allergiques tout comme vous, et excédés, qui décident d’aller suivre une cure plus ou moins longue à l’étranger. On trouve de bons établissements de soins aux Etats-Unis, au Canada, en Suède, en Nouvelle-Zélande… c’est peut-être ce qu’il y a de mieux à faire pour l’instant, en attendant l’apparition d’un remède miracle, enfin, chez nous.

Il s’interrompit pour épousseter ses lunettes avec un mouchoir puis reprit, quelque peu abattu :

- Mais cela viendra-t-il un jour ? Il faut le souhaiter, devant l’urgence…


Cette charmante demoiselle eut le malheur d'assister bien malgré elle au dernier congrès du Mouvement des Jeunes Socialistes...

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