jeudi 5 mai 2011

Nouvelle : « 2011, une satire nauséabonde » - CHAPITRE II

La camera quitta la scène de l'échange enrichissant et citoyen pour filmer de nouveau le plateau de l'émission.

Animateur : Bien Saïd, ému de retrouver le quartier ou vous avez grandi, ainsi que vos amis d’enfance ?
Saïd : Wesh !
Animateur : En tous ça fait plaisir de voir des jeunes aussi … euh… remplis de vie et d'énergie ! Bien, Saïd Brouhaha , je me tourne maintenant vers vous pour évoquer ce problème qui est sur toutes les lèvres, le malaise des jeunes de banlieue.
Saïd Brouhaha (avec un sourire carnassier) : Mais avec plaisir !
Animateur : Mais avant je dois vous avertir que nous avons introduit un nouveau concept dans l'émission : la machine qui dévoile la vérité ! Fruit des recherches les plus poussées et des dernières technologies issues des plus grands laboratoires américains et japonais cette machine est capable d’enregistrer le discours de n’importe quelle personne et de nous retranscrire ses pensées exactes ! Testée avec succès sur les plus grands hypocrites de France qui nous ont fait l’honneur de participer aux essais, elle est tellement au point, mesdames et messieurs, que depuis lors plus aucune personnalité du monde de la politique, des médias ou du spectacle n’a répondu à nos invitations ! Et c’est vous, Saïd Brouhaha, qui allez l’inaugurer ce soir !
Saïd Brouhaha (transpirant subitement) : Euh… quel honneur !
Animateur : C’est normal, et il était de mon devoir de vous prévenir avant de vous donner la parole ! Et bien allez-y Saïd, nous vous écoutons, quel est votre diagnostic ?
Saïd Brouhaha : Elle… elle est branchée la machine ? Je veux dire, vous êtes sûr qu’elle est bien au point parce que… on ne sait jamais, un faux contact et elle fait passer pour faux tout ce que j’affirme, et puis après je passe pour un menteur alors que le problème vient de la machine ! Il vaut peut-être mieux…
Animateur : Ne vous inquiétez pas Saïd, je vous ai dit qu’elle était parfaitement au point ! Mais si vous voulez vous pouvez l’essayer pour être sûr que tout va bien ! Vous allez lui dire deux phrases simples, l’une vraie, l’autre fausse, et nous verrons ce qu’elle vous dira !
Saïd Brouhaha : Euh… très bien… alors euh je m’appelle Saïd !
Machine (avec une voix digitale) : je m’appelle Saïd !
Saïd Brouhaha : Et euh… je suis euh… je ne sais pas moi, disons… comédien !
Machine : je suis un comédien !
Saïd Brouhaha : Ah ! Vous voyez ! La machine se trompe ! Le public en est témoin puisque maintenant tout le monde sait que je suis sociologue et non comédien !
Machine : Ouf ! J’ai eu chaud !
Saïd Brouhaha : Vous auriez pu arrêter votre machine franchement !
Machine : Merde ! Elle continue !
Animateur : Effectivement Saïd, il semble y avoir quelques ratés…
Saïd Bouhahoua : Ben oui tiens, essayez-la sur Saïd pour voir !
Machine : Vite je dois trouver une idée pour me défil…
Saïd Brouhaha : ET TOI TA GUEULE !!!!!!!!
Animateur : Très bien… euh Saïd, que pensez-vous de l'idée de Saïd ? voulez-vous essayer la machine ?
Saïd : Wesh ! Nik la France !
Animateur : Qu’est ce qu’il a dit?
Saïd Brouhaha : Il est d’accord !
Animateur : Ah très bien donc…
Saïd Brouhaha : Mais je ne sais pas si vous pourrez en tirer grand-chose…
Animateur : Bien… alors euh… Saïd, dites-nous quelque chose pour voir, n’importe quoi, il faut prouver à votre ami que la machine marche ! Technicien s’il vous plaît, pointez l’antenne de la machine sur Saïd !
Saïd : Wesh ! YOUYOUYOUYOUYOUYOUYOUYOU! Nique la France!
Animateur : Effectivement c’est un peu limité…
Saïd Brouhaha : Je vous l’avais dit…
Machine : …
Saïd Brouhaha : Ah ! Qu’est ce que je disais ! La machine est muette ! Elle est détraquée ! On ne peut pas lui faire confiance !
Animateur (l’oreille collée contre une des baffles de la machine) : Attendez, je crois percevoir un son très faible… technicien augmentez le volume s’il vous plait !

Le technicien s'exécute et le studio se remplit soudainement du bruit d’un souffle puissant, comme si une tempête ravageait le bâtiment…

Animateur (les mains sur les oreilles) : Baissez ! Baissez ! mais mon dieu qu’est ce que c’est que ça ?
Technicien : Euh … il semblerait que votre invité ait un courant d’air dans le cerveau monsieur !
Saïd Brouhaha (à part): Ça expliquerait bien des choses…
Animateur : Je… je ne sais pas quoi faire
Technicien : Hé c’est amusant, en modulant le son de la machine quand il fait ses « youyou » on entend le bruit de la mer !
Saïd Brouhaha : Bon, vous voyez, il y a un problème ! Votre machine est raciste monsieur ! Elle prétend que mon ami Saïd ici présent est un imbécile, quelqu’un qui ne sait pas raisonner, un kafi… je veux dire un âne batté alors que c’est un mus.. un être humain comme moi et …euh… vous ! Dans ces conditions il me semble nécessaire, par respect pour le public, de mettre un terme à cet entretien ou de continuer sans machine !
Animateur : Bien, dans ces conditions… pourtant j'étais sûr que…
Saïd Brouhaha : Ta ta ta ! On a assez perdu de temps comme ça, alors puisque vous me posez la question je vais vous répondre : en tant que sociologue je vous dirai que les jeunes des banlieues sont victimes du racisme des français dits « de souche » et devant leurs conditions de vie inadmissibles il est normal qu’ils se révoltent et fassent entendre leur colère ! C’est un phénomène tout à fait comparable à ce qui se passe dans les territoires occupés par Israël aujourd’hui !
Machine : Sombre crétin ! Je n’y connais rien a la sociologie, tout ce que je sais c’est que je vomis la France parce que son passé, son histoire, sa culture, son rayonnement nous sont inaccessibles et qu’on ne peut supporter de nous voir supplantés dans tous les domaines par des impurs, des pouilleux, des kouffar ! Vous payerez pour cela et on vous colonisera jusqu’au bout pour vous empêcher de briller à l’avenir ! Vous cesserez de nous humilier et vous vous soumettrez devant nous comme les dhimmis que vous êtes destinés à être !
Technicien : Ah vous voyez, la machine fonctionne très bien ! Elle tient un discours cohérent !
Saïd Brouhaha : Mon dieu, mais…
Dominique Fojton (versant une petite larme) : Quel enfumeur, c’est mon modèle !

Livide, le grand sociologue se jette hors de son fauteuil et s’enfuit du plateau en attrapant Saïd par le cou qui, le souffle coupé, ne peut finir ses « youyous » et manque de s'étouffer. Un silence pesant s’installe alors dans la grande salle. Pétrifié, le malheureux animateur ne sait comment réagir, incapable d’enchaîner sur un autre sujet après cet incident qu’il n’avait pas prévu.

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